lundi 16 juillet 2012

Soyons légers, c'est l'été

Ce soir, je pourrais écrire un long billet mélancolique, exprimer ma douleur de me languir de lui, qui n'a pas donné de nouvelles depuis son départ, qui je sais est revenu à Montréal, dont je vais attendre un message toute la semaine, lui qui me laisse dans l'attente, et moi qui accours au premier signe de lui. Je pourrais me perdre dans la description de ma dépassion, de mon sentiment d'être vidée de toute passion, d'être dissipée, de ne plus savoir où aller. Mais j'ai peur de t'emmerder, cher lecteur au singulier, car c'est l'été, et l'été, c'est fait pour les frivolités.
J'ai donc décidé d'écrire sur les péripéties aussi surprenantes qu'insignifiantes qui remplissent ma vie depuis une semaine.

La semaine dernière, j'ai eu un accident de voiture. Une copine et moi, on s'en allait gaiement, cheveux et jupe au vent, vers une destination de villégiature excitante, Saint-Hilaire. On s'était mises toutes belles pour l'occasion. Mais notre périple a pris fin à peine sorties de Montréal. On roulait sur l'autoroute, discutant de choses impertinentes, consultant le GPS, regardant nerveusement si on avait pris la bonne sortie, et puis un cri, un gros pick-up, un son aigu de freins, l'odeur du caoutchouc brûlé, le pick-up qui s'approchait trop vite, nous qui arrivions trop vite sur le pick-up et BANG ! Dans le cul du pick-up.

J'ai eu peur. Je voyais le gros derrière de ce pick-up, et je savais qu'on allait direct dedans. Je me suis dit : on va rentrer dedans, et je ne sais pas ce que ça va faire, mais on va rentrer dedans. Je n'ai pas vu ma vie défiler, je n'ai pas eu une dernière pensée pour Monsieur Z, je n'ai pas prié, j'ai juste pensé à ce que ça allait faire quand on allait rentrer dans le cul du pick-up à 90 km à l'heure. Je n'ai même pas crié, ni sacré; j'allais silencieusement vers ma destinée.

Après le choc, je me suis assurée que j'étais encore en vie. Ensuite, je me suis assurée que je n'étais pas blessée. Miracle : on avait survécu au choc, ça avait cogné fort, mes lunettes sont parties en ligne droite dans le pare-brise. Mes premières paroles ont été pour mon amie : "Es-tu correcte?" Mes deuxièmes paroles ont été : "Hostie, il me faut de l'alcool, de l'alcool et vite!" J'étais tendue dans le cou et dans le dos... fallait y remédier.

Bon, l'après-midi était mort, mais la soirée était jeune. Après un joyeux tour de towing (la voiture était scrap), on a décidé de fêter notre survie en allant manger au Petit Alep, un des meilleurs restos de Montréal, à mon sens à moi. Parlant de sens, les miens étaient complètement exacerbés par le choc. C'est comme si mes sens aussi avaient envie de fêter le fait qu'ils sentaient encore. J'étais euphorique et assaillie par l'envie intense de baiser. De baiser pour me sentir encore plus en vie. Ce soir-là, tous les mecs étaient beaux. Bon. À défaut de baiser, j'ai mangé. Je me suis régalée, au-delà du raisonnable je dois dire, des délicieux mets d'Alep. Ce fut une soirée mémorable.

Les moments qui suivent la peur de mourir sont toujours inoubliables. Ils revêtent un sens qu'ils n'auraient pas eu autrement.

Le lendemain, pour fuir la canicule qui allait s'installer sur Montréal, je suis partie me réfugier dans la campagne des Cantons de l'Est, chez ma mère. On est allées au spa. Un après-midi complet, j'ai trempé dans l'eau chaude, dans l'eau froide, et j'ai dormi sur de gros coussins au soleil. J'ai oublié le temps qui passait. J'ai l'oublié, lui. J'ai oublié que j'avais mal. J'ai juste senti mon corps qui se ramollissait.

Samedi, la chaleur était si intense qu'il était impossible de traverser cette journée sans la passer dans l'eau ou à l'air climatisé. N'ayant ni un ni l'autre, j'ai opté pour m'incruster dans le camping à côté de chez ma mère, histoire de profiter de leur lac et de leur piscine. Il y avait un beach party, mais qu'à ne cela ne tienne, j'étais prête à endurer n'importe quoi quitte à avoir mon cul dans l'eau. Ainsi, toute la journée, je me suis tapé une chiée de tounes poches, de ces tounes dont on a honte juste à les entendre.

Voici quelques exemples de ce que j'entends par tounes poches :

Ça
Ça
Et ça


Et le tout, mes amis, entourée de purs douchebags trentenaires qui, auprès de leurs enfants et de leur femme, sirotaient une bière de piètre qualité directement sortie du cooler, ressortant fièrement leur grosse bedaine d'hommes qui boivent de la bière (parce que c'est tellement viril de boire une bière en bedaine, encore plus si elle est grosse), souriant béatement, pour ne pas dire bêtement, au bonheur de la vie simple, vous savez la vie simple, quand le bonheur réside dans les petites choses de la vie telles que boire une bonne Bud pas très fraîche sur le bord d'un lac artificiel trop chaud et plein d'algues et de pipi en compagnie de kids et meuf, les lunettes de soleil de marque sur le nez en regardant la seule jolie fille allongée sur la plage, à savoir : moi.

Et je vous parle pas de la nécessaire et inévitable lifeguard cuty aux cheveux blonds et au teint bronzé qui se pavane avec sa bouée inutile, bombant généreusement le torse, la confiance en soi dans le tapis et heureuse de faire bander les mecs sur son passage.

Bref, que des clichés que j'ai observés. Pourvu que j'étais dans l'eau, tout cela prenait une tournure très romanesque.

Me voilà donc de retour dans mon inertie montréalaise. De retour dans mon marasme. De retour devant mon ordi, à guetter fébrilement ma boîte de déception. À attendre, encore et encore, de ses nouvelles.

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